Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/190

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arriver, que de fausses nouvelles dissipent nos appréhensions. Et, par conséquent, ce n’est pas la présence du vrai, en tant que vrai, qui détruit les impressions de l’imagination ; ce sont des impressions plus fortes, qui, de leur nature, excluent l’existence des choses que l’imagination nous représentait, comme nous l’avons montré dans la Propos. 17, part. 2.


PROPOSITION II

Nous pâtissons en tant seulement que nous sommes une partie de la nature, laquelle partie ne se peut concevoir indépendamment des autres.

Démonstration : On dit que nous pâtissons, quand il survient en nous quelque chose dont nous ne sommes la cause que partiellement (par la Déf. 2, part. 3), en d’autres termes (par la Déf. 1, part. 3), quelque chose qui ne se peut déduire des seules lois de notre nature. Nous pâtissons donc en tant que nous sommes une partie de la nature, laquelle ne peut se concevoir indépendamment des autres.


PROPOSITION III

La force, par laquelle l’homme persévère dans l’existence, est limitée, et la puissance des causes extérieures la surpasse infiniment.

Démonstration : Cela résulte évidemment de l’axiome qui précède. Car l’homme étant donné, quelque chose de plus puissant est aussi donné ; appelons-le A : A lui-même étant donné, quelque chose de plus puissant, B, est aussi donné, et de même à l’infini ; conséquemment, la puissance de l’homme est limitée par la puissance d’une autre chose, et elle est infiniment surpassée par la puissance des causes extérieures. C. Q. F. D.


PROPOSITION IV

Il est impossible que l’homme ne soit pas une partie de la nature, et qu’il ne puisse souffrir d’autres changements que ceux qui se peuvent concevoir par sa seule nature et dont il est la cause adéquate.

Démonstration : La puissance par laquelle les choses particulières, et partant l’homme, conservent leur être, c’est la puissance même de Dieu ou de la nature (par le Coroll. de la Propos. 24, part. 2), non pas en tant qu’infinie, mais