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Nous ne pouvons haïr un objet qui nous inspire de la commisération, par cela seul que le spectacle de sa misère nous met dans la tristesse.

Démonstration : Si, en effet, cela suffisait pour nous inspirer de la haine contre lui, il arriverait alors (par la Propos. 23, partie 2) que nous nous réjouirions de sa tristesse, ce qui est contre l’hypothèse.

Corollaire III : Chaque fois qu’un objet nous inspire de la commisération, nous nous efforçons, autant qu’il est en nous, de le délivrer de sa misère.

Démonstration : Toute chose qui cause de la tristesse à un objet dont nous avons pitié nous inspire une tristesse semblable (par la Propos. précéd.), et alors nous nous efforçons (par la Propos. 13, partie 3) de nous rappeler tout ce qui supprime l’existence de cette choses c’est-à-dire ce qui la détruit ; en d’autres termes (par la Propos. 9, partie 3), nous désirons sa destruction, nous sommes déterminés à la détruire, et partant nous nous efforçons de délivrer de sa misère l’objet dont nous avons pitié. C. Q. F. D.

Scholie : Cette volonté, ou cet appétit de faire le bien, qui naît de la commisération que nous ressentons pour l’objet à qui nous voulons faire du bien, s’appelle bienveillance, laquelle n’est donc que le désir né de la commisération. Du reste, pour ce qui est de l’amour ou de la haine que nous ressentons pour celui qui fait du bien ou du mal à nos semblables, voyez le Schol. de la Propos. 22, partie 3.


PROPOSITION XXVIII

Toute chose qu’on se représente comme conduisant à la joie, on fait effort pour qu’elle arrive ; si au contraire, elle doit être un obstacle à la joie et mener à la tristesse, on fait effort pour l’écarter ou la détruire.

Démonstration : Toute chose que nous imaginons comme conduisant à la joie, nous faisons effort pour l’imaginer ; autant qu’il nous est possible (par la Propos. 12, part. 3), en d’autres termes (par la Propos. 17, part. 2) pour l’apercevoir autant que possible comme présente, c’est-à-