Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/300

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exécuter ce commandement. Ainsi ce commandement est l’unique règle de toute la loi catholique, le seul moyen de déterminer tous les dogmes de la foi auxquels chacun est tenu de se conformer. Puisque cela est très-évident et que tout le reste en découle, que l’on réfléchisse comment il a pu se faire que tant de dissensions se soient élevées dans l’Église, et s’il a pu y avoir d’autres causes de ces troubles que celles qui ont été exposées dans le commencement du chapitre VII. Ce sont aussi ces mêmes causes qui me portent à exposer de quelle façon on peut déterminer les fondements de la foi d’après la règle qui vient d’être découverte ; car si je n’aboutissais à aucun résultat précis et déterminé, on croirait à bon droit que je n’ai guère avancé la question, puisque chacun pourrait introduire dans la religion tout ce qu’il voudrait, sous ce prétexte que c’est un moyen qui le dispose à l’obéissance ; et cette difficulté se fera surtout sentir quand il s’agira des attributs divins. Donc, pour traiter avec ordre le sujet tout entier, je commencerai par la détermination exacte de la foi, qui, d’après le fondement que j’ai posé, doit être ainsi définie : la foi consiste à savoir sur Dieu ce qu’on n’en peut ignorer sans perdre tout sentiment d’obéissance à ses décrets, et ce qu’on en sait nécessairement par cela seul qu’on a ce sentiment d’obéissance. Cette définition est assez claire, et elle dérive assez évidemment des explications précédentes pour n’avoir besoin d’aucune démonstration. Mais j’exposerai en peu de mots les conséquences qui en résultent, savoir : 1° que la foi n’est point salutaire en elle-même, mais seulement en raison de l’obéissance, ou, comme le dit Jacques (chap. II, vers. 17), que la foi, à elle seule et sans les œuvres, est une foi morte ; voyez à ce sujet tout le chapitre II de cet apôtre ; 2° il s’ensuit que celui qui est vraiment obéissant a nécessairement la foi vraie et salutaire ; car l’esprit d’obéissance implique nécessairement l’esprit de foi, comme le déclare expressément le même apôtre (chap. II, vers. 18) par ces paroles : Montre-moi ta foi