mais je persiste à tenter l’épreuve, convaincu qu’il ne faut point désespérer d’un heureux succès.
Pour procéder avec ordre, j’examinerai d’abord les préjugés établis touchant les écrivains qui ont composé les livres saints ; je commencerai par l’auteur du Pentateuque. On a cru généralement que cet auteur est Moïse. Les pharisiens défendaient si fermement cette opinion qu’on n’y pouvait contredire sans être à leurs yeux hérétique, et c’est pourquoi Aben-Hezra, homme d’un libre génie et d’une érudition peu commune, qui a découvert le premier, à ma connaissance, le préjugé que je vais combattre, n’a pas osé dire ouvertement sa pensée, se bornant à l’indiquer en termes très-obscurs. Pour moi, je vais dire nettement le fond de ma pensée et montrer clairement ce qui en est. Voici d’abord les paroles d’Aben-Hezra que je trouve dans son commentaire du Deutéronome : « Au delà du Jourdain… pourvu que tu entendes le mystère des douze… Moïse a écrit aussi la loi… et alors le Chananéen était en ce pays… ce qui sera manifesté sur la montagne de Dieu… et voici son lit, son lit de fer… alors tu connaîtras la vérité. » Par ce peu de paroles, Aben-Hezra donne à entendre et en même temps il fait voir que ce n’est point Moïse qui a écrit le Pentateuque, mais un écrivain très-postérieur, et que le livre écrit par Moïse est tout autre que celui que nous avons. Pour établir ce point, il observe premièrement : que la préface même du Deutéronome, ne peut avoir été écrite par Moïse, puisqu’il ne passa pas le Jourdain. En second lieu, que le livre entier de Moïse fut écrit sur le circuit d’un seul autel (voyez le Deutéronome chap. xxvii, et Josué, chap. viii, vers. 37, etc.), qui, d’après la tradition des rabbins, n’était formé que de douze pierres, ce qui prouve clairement que ce livre avait bien moins d’étendue que le Pentateuque. C’est ainsi du moins que j’entends le mystère des douze, dont parle Aben-Hezra, à moins qu’il n’ait voulu faire allusion aux douze malédictions dont il est question au chapitre déjà cité du Deutéronome, et