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AVANT-PROPOS.




Quand je publiai, il y a seize ans, la première traduction française des œuvres de Spinoza, j’y ajoutai une Introduction de quelque étendue pour servir de guide au lecteur. Mon but n’était pas de réfuter Spinoza, mais seulement de l’éclaircir, et comme cette tâche me semblait déjà assez difficile, je remettais à un autre jour le soin et le péril d’une réfutation.

Pourquoi ai-je tardé si longtemps à tenir ma promesse ? assurément ce n’est point faute d’y avoir pensé. Car depuis les commencements de ma carrière je puis dire que Spinoza et le panthéisme ont été ma plus constante préoccupation. Partout où j’ai eu à porter la parole, j’en appelle à mes auditeurs de l’École normale, du Collége de France et de la Sorbonne, dans tous mes essais d’écrivain, mémoires à l’Institut, articles pour la Revue des Deux Mondes et pour le Dictionnaire des sciences philosophiques, toujours et en toute occasion j’ai signalé les progrès du panthéisme et proclamé l’urgente nécessité de combattre l’ennemi. C’est au point qu’on m’a accusé en souriant de m’inquiéter de Spinoza plus que de raison, et d’être sujet à cette erreur d’optique qui grossit les objets qu’on regarde trop. Je voudrais de tout mon cœur qu’il en fût ainsi et que le panthéisme