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ment, pour nous en délivrer et ne rien admettre que nous ne percevions clairement et distinctement, il continue en faisant une revue de toutes les notions et idées simples dont toutes nos pensées sont composées ; il les examine chacune en particulier afin d’observer ce qu’il y a de clair et ce qu’il y a d’obscur en chacune, Ainsi pourra-t-il aisément distinguer le clair d’avec l’obscur et former des pensées claires et distinctes ; et il sera facile par là de trouver une distinction réelle entre l’âme et le corps ; ce qu’il y a de clair et ce qu’il y a d’obscur dans les perceptions que nous avons par les sens ; en quoi enfin le rêve diffère de l’état de veille. Après quoi il ne peut plus ni douter de ses veilles ni être trompé par les sens ; et ainsi s’est-il délivré de tous les doutes ci-dessus énumérés.

Avant cependant que je termine cette introduction, il faut, ce semble, que je donne satisfaction à ceux qui objecteraient : comme l’existence de Dieu ne nous est pas connue par elle-même, il ne paraît pas que nous puissions être certains d’aucune chose ; car de prémisses incertaines (et nous avons dit que tout était incertain aussi longtemps que nous ignorons notre origine) il ne se peut rien conclure, de certain.

Pour écarter cette difficulté Descartes répond ainsi : de ce que nous ne savons pas encore si peut-être l’auteur de notre origine ne nous a pas créés tels que nous devions être trompés même dans les choses qui nous paraissent les plus évidentes, il ne suit pas que nous puissions douter de ce que nous connaissons clairement et distinctement en soi-même, ou même par le raisonnement, pendant le temps que nous y sommes attentifs ; nous pouvons douter seulement de ce que nous antérieurement démontré qui était vrai, et dont le