Page:Œuvres de Spinoza, trad. Appuhn, tome I.djvu/319

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tout ce qui est perçu aussi clairement et distinctement que cette première vérité est vrai.

Qu’il ne puisse y avoir d’autre fondement des sciences que celui-là, ce qui précède le montre avec une clarté suffisante et plus que suffisante, parce que tout le reste peut être révoqué en doute sans aucune peine, mais que cela ne peut l’être en aucune façon. A l’égard toutefois de ce principe : je doute, je pense, donc je suis, il importe avant tout d’observer que cette affirmation n’est pas un syllogisme, dont la majeure serait passée sous silence. Car, si c’était un syllogisme, les prémisses devraient être plus claires et mieux connues que la conclusion même : donc je suis ; et, par conséquent, je suis ne serait pas le premier fondement de toute connaissance ; outre que cette conclusion ne serait pas certaine, car sa vérité dépendrait de prémisses universelles que notre Auteur a depuis longtemps révoquées en doute. Ainsi ce je pense, donc je suis, est une proposition unique équivalant à celle-ci : je suis pensant.

Il faut savoir, en outre, pour éviter la confusion dans ce qui suivra (car la chose doit être perçue clairement et distinctement) ce que nous sommes ? Car une fois qu’on l’aura connu clairement et distinctement, notre essence ne pourra plus être confondue avec d’autres. Pour le déduire de ce qui précède, notre Auteur continue comme il suit.

Il rappelle à sa mémoire toutes les pensées qu’il a eues autrefois sur lui-même : que son âme était un corps subtil semblable au vent, au feu ou à l’éther répandu dans les parties plus épaisses du corps ; que son corps lui était plus connu que son âme et qu’il en avait une perception plus claire et plus distincte. Il trouve que tout cela est en contradiction manifeste avec