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et un prédicat ; si cette liaison existait, on verrait en même temps le moyen et les causes par où et pourquoi cette métamorphose a lieu. On ne prend pas garde non plus à la nature du sujet et du prédicat. En outre, pourvu seulement qu’une première idée ne soit pas forgée et que toutes les autres en soient déduites, l’empressement à forger disparaîtra peu à peu. De plus, une idée forgée ne peut être claire et distincte, mais seulement confuse et toute confusion provient de ce que l’esprit connaît un entier, ou une chose composée de beaucoup d’autres, seulement en partie et ne distingue pas le connu de l’inconnu ; de ce que, en outre, il s’attache à la fois aux nombreux éléments contenus dans chaque objet sans les distinguer le moins du monde, d’où il suit : Primo, que si une idée se rapporte à une chose très simple, elle ne pourra être que claire et distincte. Cette chose en effet ne devra pas être connue en partie mais ou bien elle le sera tout entière ou il n’en sera rien connu. Secundo, que si une chose composée de beaucoup de parties est divisée par la pensée en toutes ses parties les plus simples et qu’on soit attentif à chacune d’elles prise à part, toute confusion disparaîtra. Tertio, qu’une fiction ne peut pas être simple ; elle naît de la combinaison des diverses idées confuses qui se rapportent à des choses et à des actions diverses existant dans la Nature ; plutôt encore de ce que nous sommes attentifs en même temps, sans leur donner[1] notre assentiment, à ces diverses idées ; si la fiction était simple, en effet, elle serait claire et dis-

  1. On observera qu’une fiction considérée en elle-même ne diffère pas beaucoup d’un songe, sauf que dans les songes font défaut ces causes qui, par le moyen des sens, s’offrent à l’homme