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la maison ; tous les frères implorent sa grâce. Mais le jeune homme baisse les yeux ; il dépose en silence son habit, baise la main sévère du grand maître, et s’en va. Celui-ci le suit du regard, puis le rappelle avec affection, et dit : « Embrasse-moi, mon fils ! Tu es sorti heureusement d’un plus rude combat. Prends cette croix : c’est la récompense de l’humilité qui s’est vaincue elle-même. »


LA FOI ALLEMANDE[1]


POUR le sceptre de la Germanie luttait avec Louis de Bavière Frédéric de la race de Habsbourg, tous deux appelés au trône[2] ; mais l’envieuse fortune de la guerre jette le jeune Autrichien dans les fers de son ennemi, qui l’a dompté dans le combat. Au prix de son trône, il se rachète : il lui faut donner sa parole qu’il tirera l’épée pour le vainqueur contre ses propres amis. Mais ce qu’il a promis dans les fers, libre il ne peut l’accomplir : alors, voyez ! il revient volontairement à ses chaînes.

Profondément ému, son ennemi l’embrasse, et dès lors, comme un ami avec son ami, ils échangent, pleins de confiance, leurs coupes dans le festin. Dans les bras l’un de l’autre, les deux princes sommeillent sur la mème couche, tandis qu’une haine sanglante déchire encore leurs peuples, en proie à la fureur. Il faut que Louis marche contre l’armée de Frédéric.

  1. Publié d’abord dans les Heures en 1795.
  2. Il y a ici, dans la première édition, deux vers de plus : « Le premier avait pour appui la puissance de Luxembourg et la majorité des électeurs ; le second, le pouvoir de l’Église et les mérites de sa race. »