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clin pendant son enfance et pendant toutes ses guerres : il dut sa fortune au célèbre capitaine et en reçut un legs de cent écus d’or. Son frère occupait un siège épiscopal. Guillaume portait d’argent aux trois coquilles de sable, deux et une. Dans le cours du dix-septième siècle, la famille s’établit au Mans. Ses papiers ayant été détruits à l’époque de la Révolution, elle ne peut appuyer d’aucun acte décisif ses prétentions à une alliance naturelle avec le poëte ; mais elle revendique cet honneur par suite d’une tradition orale, que de nouveaux renseignements confirmeront peut-être un jour[1].

La fortune devait avoir assez bien traité les parents de notre auteur, car ils purent faire donner une éducation savante à leurs deux fils, quoiqu’ils eussent en outre six filles[2]. Une de ces filles, Simone Desportes, fut épousée par un bourgeois de Chartres, un notable, puisqu’il était échevin, et elle mit au monde le poëte Régnier.

Après l’achèvement de ses études, Philippe entra chez un procureur de Paris. Le jeune clerc montra dès lors cette humeur galante, qui devait lui inspirer presque toutes ses poésies. L’homme de loi possédait une jolie femme, que ne tardèrent point à émouvoir les œillades de Desportes. Il griffonnait peut-être aussi des vers pour elle, car il fut tenté de bonne heure par le démon poétique[3]. Mais le gratte-papier remarqua leur penchant mutuel, et, un jour que son auxiliaire était allé en course, il fit un paquet de ses hardes, nous dit Tallemant des Réaux, les pendit au maillet de la porte qui fermait l’allée de son habitation, et mit auprès un avertissement ainsi conçu :

  1. C’est l’espérance de M. Fernand Desportes, avocat et docteur en droit, le plus jeune représentant de cette famille.
  2. Dom Liron, dans sa Bibliothèque chartraine, prétend que Philippe avait un second frère, nommé Joachim Desportes, et lui attribue un Discours sommaire du règne de Charles IX, de sa mort et de ses dernières paroles, imprimé à Paris l’an 1574, in-8o. Il est le seul écrivain qui parle de ce frère ; Tallemant des Réaux ne le mentionne pas. La ressemblance des noms de famille a trompé le bénédictin, et Niceron l’a réfuté dans ses Mémoires pour servir à l’Histoire des hommes illustres, t. XXV. Ce Joachim n’avait aucun lien de parenté avec notre poëte.
  3. Un homme qui l’avait connu intimement l’atteste de la matière la plus positive :

    Si qu’encores enfant des vers il façonna,
    Et de sa docte voix un chacun étonna.
    Si loin par son savoir il devançoit son âge !
    De sa grandeur future infaillible présage.


    Voyez, à la fin du volume, le Tombeau de Desportes, par le sieur Jacques de Montereul.