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Ta parole est seule asseurée,
Et quand plus n’aura de durée
Du ciel l’assidu mouvement,
Elle encor demeurera ferme,
Comme n’ayant ny fin ny terme,
Non plus que de commencement.

Seigneur, c’est sur ceste parole
Que je m’asseure et me console
Quand mon cœur se pasme d’effroy ;
C’est elle qui me fortifie
Et qui fait qu’ainsi je me fie
En Christ, mon sauveur et mon roy.

Fondé sur chose si certaine,
Auroy-je une esperance vaine ?
N’auroy-je ce qu’ay desiré ?
Mon attente est en ta clemance,
Ta parole est mon asseurance :
Sçauroy-je mieux estre asseuré ?

C’est pourquoy desjà j’ose dire
Que rien n’a pouvoir de me nuire,
Le peché, l’enfer ny la mort.
Ta bonté me donne courage ;
Qui peut m’asseurer davantage
Qu’un Dieu si puissant et si fort ?

Continue, ô Dieu ! continue,
Afin que ta force connue
Soit tousjours mon seul argument,
Delaissant les faulses louanges
De mille et mille dieux estranges
Que j’ay chantez trop follement.

Qu’en mes vers desormais j’efface
Tant de traits, d’ardeurs et de glace ;
Qu’on ne m’entende plus vanter
Les yeux d’une beauté mortelle,
Qui, par quelque douce cautelle,
Auroient sceu mes sens enchanter.

Je m’en repens, rouge de honte,
Quand je mets quelquefois en conte
Tant de propos que j’ay perdus,
Tant de nuicts vainement passées,
Tant et tant d’errantes pensées,
Et de cris si mal entendus.

Ores troublé de jalousie,
Ore ayant dans la fantaisie
Quelque autre elancement nouveau,
Selon que les vagues soudaines