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Plusieurs ont soustenu que la mort rigoureuse
Pour plaire à Jupiter n’avança son trespas ;
Mais que de ses beautez elle estoit amoureuse,
Et, voulant en jouïr, le ravit d’icy-bas.


DE LUY-MESME


Quel nouveau Diomede, alteré de mon sang,
T’a meurtry, cher enfant ? disoit Venus la belle.
Ô celeste impuissance ! ô cruauté nouvelle !
Qu’un dieu mesme en ce tans des mortels ne soit franc !

Lavant de pleurs son corps, d’où sortoit un estang
De couleur tyrienne, à sa tresse est cruelle,
Et par maint chaud soupir de puissance immortelle
S’efforce à ranimer ce marbre froid et blanc.

« Ce n’est pas Cupidon, c’est Maugiron, deesse, »
Luy dit quelqu’un tout bas, pour l’oster de tristesse ;
Mais elle jette alors des cris plus enflammez,

Et sent de sa douleur la poison plus amere,
Car, ainsi que d’Amour, de l’autre elle estoit mere,
Et les derniers enfans sont tousjours mieux aimez.


SUR LA MORT DE MADAMOISELLE DE ROSTAIN


La clarté du soleil devint pasle et desfaite,
Sur le point que Rostain d’entre nous disparut…
Rostain ? non, mais le jour que la beauté mourut,
Car Rostain fut le nom de la beauté parfaite.

Elle servit en terre aux Graces de retraite ;
Amour, sous son adveu, toute France courut.
Qui l’a veit, l’adora. Cloton, qui la ferut,
Ne fust qu’elle est aveugle, eust esté sa sujette.

Rostain, autrefois l’aise, or’ le dueil de nos yeux,
Clair flambeau d’icy-bas, luisant soleil des cieux,
Les destins aux amans ta lumiere ont voilée,

Afin que leurs esprits, trop en terre arrestez,
Recogneussent le ciel pour sejour des beautez,
Te voyans dans le ciel si soudain revolée.


DE CLAUDE DE L’AUBESPINE


SECRETAIRE DES COMMANDEMENS
[1]


Tout ce que la nature et le ciel favorable
Pouvoient pour rendre un homme heureux parfaitement,

  1. Voyez l’Introduction.