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VI

Ces coustaux verdissans en gazons relevez,
Qui commencent encor à pousser un herbage,
Des chasseurs bien experts les meilleurs sont trouvez ;
Mais ils veulent des chiens qui soient de grand courage.
Un chien foible de reins se rompt soudainement ;
On a beau forhuer et sonner hautement,
Quand il a fait un cours, sa force diminuë
Et, sans plus requester, il va branlant la queuë.


VII

Nos chiens ne sont pas tels, mais, tousjours vigoureux,
Echauffez du plaisir vont supportant la peine ;
Ils ne craignent l’hyver ny l’esté chaloureux,
Un cry les resjouyt et les met en haleine,
Et sans estre en defaut, legers comme le vant,
Tousjours bien ameutez, le droit ils vont suivant ;
Et n’y a lieu si fort, ne si serré bocage,
Qu’ils n’y mettent la teste et n’y trouvent passage.


VIII

Quel plaisir pensez-vous qu’un chasseur doit avoir,
Poursuivant finement une beste rusée,
Qui tournoye en son fort, pensant le decevoir,
Ou qui donne le change et fait sa reposée,
Quand apres grand travail il la voit commencer
À se feindre le corps et sa teste baisser,
Chanceler coup sur coup, à la fin renversée,
Tomber à sa mercy toute molle et lassée ?


IX

Dames qui, par vos yeux amoureusement doux,
Rendez comme il vous plaist une ame assujettie,
Sans perdre ainsi le tans chassez avecques nous,
Et la chasse en commun vous sera departie ;
Prestez-nous seulement vos bois et vos forests,
Nous fournirons de chiens, de courtaux et de rets ;
Et, bien que sur nous seuls la peine soit remise,
Vous aurez le plaisir et le fruit de la prise.