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Lise ces vers qu’habile il sçeut tirer
De vostre esprit, digne d’une deesse.

Pensers, desirs, soupirs, feux et glaçons,
Sont les sujets de ces belles chansons,
Où seule à part vous retenez vostre ame.

Cœur n’est si froid qui n’en fust allumé ;
Cachez-les donc, ô mon mal bien-aimé !
Car sans les voir je n’ay que trop de flame.


POUR UNE FAVEUR SEMÉE DE DIVERSES BRANCHES


DONNÉE À MONSIEUR LE DUC D’ANJOU


Le ciel, qui mieux que moy vous peut favoriser,
Soit à vostre grandeur pour jamais favorable,
Couronnant vos vertus d’un renom si durable,
Que la force du tans ne le puisse briser.

Desjà vos faits guerriers partout vous font priser,
Plantant sur vostre front maint trophée honorable,
Puis ceste grand’ douceur et ce cœur immuable
Malgré les ans vainqueurs vous peut éterniser.

Il restoit que l’Amour vous mist sous son empire,
Comme il fait tous les dieux, afin qu’on vous peust dire
Pacifique, immuable, amoureux et guerrier.

Et qu’une, qui vous est saintement asservie,
Vous offrist à bon droit, en vous offrant sa vie,
L’ollivier, le palmier, le meurte et le laurier.


À MADEMOISELLE DE SURGERES


HELENE DE FONSEQUES


Comme on voit au printans le bouton rougissant,
Amoureux du soleil, languir en son absance,
Puis en le revoyant changer de contenance,
D’odeurs et de beautez le ciel resjouyssant.

Tout ainsi mon esprit tristement languissant,
Durant l’obscure nuict des miseres de France,
Voyant de vos beautez l’agreable presence,
S’égaye et veut encor se monstrer florissant.

Or si la saincte ardeur qui vient de vous l’enflame,
Je vous nomme à bon droit le soleil de mon ame,
M’efforçant de monstrer sa divine clarté ;

Que, si selon mon cœur j’y pouvoy satisfaire,
Le vice deviendroy de soy-mesme adversaire,
Voyant de vos vertus l’admirable beauté.