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Quand, avec un penser plaisant et soucieux,
Olympe se reveille, entr’ouvrant ses beaux yeux.
Doucement tout autour la veuë elle a tournée,
Puis se tint sans mouvoir comme toute estonnée ;
En fin pleine d’amour son chef elle haussa,
Et ces mots, l’œil au ciel, bassement prononça :
Fille de Jupiter, ô divine Cythere !
Qui, sous le voile ombreux de la nuit solitaire,
M’as daigné consoler, je te suy desormais,
Et ma belle jeunesse en tes mains je remets.
Loin, loin fable d’honneur, qui m’a tenuë en crainte !
Arriere, ô vains respects ! vous m’avez trop contrainte,
Je ne redoute plus les propos envieux,
Et toy, mary jaloux, d’un œil trop curieux,
Invoque tes esprits, veille apres moy sans cesse ;
J’auray pour mon secours l’amoureuse deesse,
Qui me delivrera de ta captivité.
Debile est un mortel contre la deïté.
De mille autres propos, chauds d’amoureuse flame,
Olympe attainte au vif s’asseuroit en son ame,
Et se donnoit courage, afin de mieux oser
Pour sa belle entreprise hardiment exposer.
Elle en parle à Camille et le songe luy conte,
Camille aussi soudain à ses desirs est pronte ;
Amour luy donnoit cœur, le fait luy semble aisé,
Puisque de Venus mesme il est favorisé.
Tousjours de plus en plus ce desir continuë,
Et leur tarde beaucoup que l’heure soit venuë,
Mais ce ne fut pas tout : Olympe qui sçavoit
Qu’au sang de Fleurdelys Amour ses traits lavoit,
Ayant en mille endroits sa poitrine enserrée
Par les divins attraits du gracieux Nirée,
Compagnon d’Eurylas, veut que pareillement
Elle soit leur compagne en ce contentement.
Olympe, que fais-tu ? les amoureux mysteres
Sont tousjours plus sacrez, plus ils sont solitaires.
Ne t’avises tu point que c’est trop entrepris ?
Tu passes le conseil de la belle Cypris,
D’accroistre ainsi le nombre et mettre en la partie
La jeune Fleurdelys, sans l’avoir advertie.
Car vous la fustes prendre, et feignant la mener
Pour passer la journée avec vous pourmener,
Vous partez toutes trois. Tu marchois la premiere,
La honte aucunesfois te fait tourner arriere,
Ton pié douteux chancelle et n'oses plus passer,
Mais l’Amour aussi-tost te contraint advancer.