Des desirs la source feconde,
Mere des nouvelles amours,
De tout l’univers reconnuë,
Que me sert ta douce venuë,
Si mon hyver dure tousjours ?
Royne des fleurs et de l’année,
Tousjours pompeuse et couronnée,
Doux soulas des cœurs oppressez ;
Par tout où tes graces arrivent,
Les jeux et les plaisirs te suivent :
Les miens, où les as-tu laissez ?
Quand je voy tout le monde rire,
C’est lors qu’à part je me retire,
Tout morne, en quelque lieu caché :
Comme la veufve tourterelle,
Perdant sa compagne fidelle,
Se branche sur un tronc seiché.
Le soleil jamais ne m’esclaire,
Tousjours une erreur solitaire
Couvre mes yeux de son bandeau :
Je ne voy rien que des tenebres,
Je n’enten que des cris funebres,
Je n’aime rien que le tombeau.
La France, en partis divisée,
Sent enfin sa rage accoisée
Au doux leniment d’une paix :
Las ! pourquoi l’ay-je souhaitée,
Si la guerre est plus irritée
Entre mes pensers que jamais ?
Pensers qui font dedans ma teste
Un bruit estrange, une tempeste,
Et dressent cent mille combats :
Mais quoy qui gaigne l’advantage,
Sur moy seul tombe le dommage
Et la perte de leurs debats.
Las ! qu’Amour me rend miserable !
Las ! que la joye est peu durable ;
Las ! que constante est la douleur :
Que du sort la rouë est legere,
Que l’esperance est mensongere,
Que l’homme est sujet au malheur !
Non, non, sous le ciel de la lune,
Tout va comme il plaist à Fortune,
Elle seule est royne icy bas :
S’il y a quelque providence,
Au ciel elle a sa residence,
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