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T r a g é d i e.

A C T E   I I I.
S C È N E   P R E M I È R E
S U N N O N,   G O N T R AN.
S U N N O N.

Arreſtons, cher Gontran, c’eſt dans ces lieux ſacrés,
Décorés avec faſte, au fond peu révérés,
Qu’à la face des Dieux nous allons voir éclore
Un projet qui m’alarme, & qui les déſhonore.
C’eſt ici que bien-tôt Craſſus, Catilina,
Antoine, Céthégus, les enfants de Sylla,
Mille autres dont les noms éclatent dans l’hiſtoire,
Et qui de leurs ayeux flétriſſent la mémoire,
Vont de leur ſang impur ſceller leur union,
Et livrer Rome entière à la proſcription.
Heureux, ſi je pouvois, en ce déſordre extrême,
D’un parti que je hais me dégager moi-même !
Entraîné dès long temps, peut-être corrompu
Par un ambitieux qui ſéduit ma vertu,
Je me trouve forcé d’embraſſer ſa querelle,
D’être ennemi de Rome, ou miniſtre infidèle.

Ee ij