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SCÈNE VII.
IDAMANTE, ſeul.

Dieux ! Quel trouble eſt le mien ! Quel horrible myſtère
Fait fuir devant mes yeux Sophronyme & mon père ?
Non, ſuivons-le : ſon cœur encor mal affermi
Ne me pourra cacher ſon ſecret qu’à demi :
Je l’ai vu s’émouvoir, & contre ma pourſuite
Il ſe défendait mal ſans une prompte fuite.
Pénétrons… mais d’où vient que je me ſens glacer ?
Quelle horreur à mes ſens vient de ſe retracer !
Quelle inviſible main m’arrête & m’épouvante ?
Allons… où veux-je aller ? Et qu’eſt-ce que je tente ?
De quel ſecret encor prétends-je être informé ?
Eh ! Ne connais-je pas le ſang qui m’a formé ?
Peu touché des vertus du grand Idoménée,
Le ciel rendit toujours ſa vie infortunée :
Son funeſte courroux l’arracha de ſa cour,
Et n’a que trop depuis ſignalé ſon retour.
Ah ! Renfermons plutôt mon trouble & mes alarmes,
Que d’oſer pénétrer dans d’odieuſes larmes.
Suivons-le cependant… pour calmer mon effroi,
Dieux, faites que ces pleurs ne coulent que pour moi.