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SCÈNE III.
Idoménée, Sophronyme.
S O P H R O N Y M E.

Que faites-vous, ſeigneur ? Eſt-il temps que votre âme
S’abandonne aux tranſports d’une honteuſe flamme ?

I D O M É N É E.

Pardonne ; tu le vois, la raiſon à ſon gré
Ne règle pas un cœur par l’amour égaré.
Je me défends en vain : ma flamme impétueuſe,
Détruit tous les efforts d’une âme vertueuſe ;
D’un poiſon enchanteur tous mes ſens prévenus
Ne ſervent que trop bien le courroux de Vénus.
Je ſens toute l’horreur d’un amour ſi funeſte ;
Mais je chéris ce feu que ma raiſon déteſte :
Bien plus, de ma vertu redoutant le retour,
Je combats plus ſouvent la raiſon que l’amour.

S O P H R O N Y M E.

Ah ! Seigneur ! Eſt-ce ainſi que le héros s’exprime !
Eſt-ce ainſi qu’un grand cœur cède au joug qui l’opprime ?
Le courroux de Vénus peut-il autoriſer
Des fers que votre gloire a dû cent fois briſer ?
Parmi tant de malheurs, eſt-ce au vainqueur de Troie