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Il ignore qu’un ſang qui fit toute ſa haine
Faſſe tout mon amour, que j’adore Érixene.
Que ne m’eſt-il permis d’ignorer à mon tour
Que la haine ſera le prix de mon amour !
Je défis Mérion ; plus juſte ou plus ſévère,
Le roi ſacrifia ce prince téméraire :
Prémices d’un retour fatal à tous les deux,
Prémices d’un amour encor plus malheureux.
C’eſt en vain que mon cœur brûle pour Érixène ;
En vain… Dans cette nuit, ciel ! Quel deſſein l’amène ?


SCÈNE V.
Idamante, Érixène, Policlète, Iſmène.
I D A M A N T E.

Madame, quel bonheur ! Euſſé-je cru devoir
À la fureur des dieux le plaiſir de vous voir ?

É R I X È N E.

J’eſpérais, mais en vain, jouir de leur colère ;
J’ai cru que cette nuit allait venger mon père,
Et que le juſte ciel, de ſa mort irrité,
N’en verrait point le crime avec impunité.
D’un courroux légitime inutile eſpérance !
Avec trop de lenteur le ciel ſert ma vengeance :