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de me remettre à l’étude, je me livrai à des travaux agricoles. Je n’étais connue aux environs que comme une planteuse et une défricheuse acharnée. Enfin le calme se rétablit. Les livres, les journaux, les revues de tous les pays prirent le chemin de ma colline. Dès-lors, plus un moment de vide ni d’ennui. Mais voici qu’un beau matin, au moment où j’y pensais le moins, j’entendis tout à coup des rimes bourdonner à mes oreilles. Le vieux français, avec son cortège de locutions si fines et si charmantes, me revint en même temps à la mémoire. J’étais précisément en train de lire un grand poème indien, où j’avais rencontré certains épisodes qui, parce qu’ils traitaient d’amour conjugal, m’avaient enchantée. Dans la surprise du premier moment et, pour ainsi dire, inconsciemment, au, mépris de la couleur locale et des égards dus à d’aussi respectables sujets, je me trouvai les avoir brodés à la gauloise en quelques matinées[1]. Ma

  1. Dans les passages suivants de mon journal, voici l’expression sincère et vive de l’étonnement que me causa ce que j’appellerai mon épanouissement sénile :
    « 3 Novembre 1852.

    « Depuis un mois une vie nouvelle a commencé pour moi. La fantaisie me sourit de tous les points de l’ho-