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Jusqu’à verser un sang innocent et divin.
À quel degré d’effroi, de désir, de démence,
Ton noble cœur, Pascal, était-il donc monté,
Pour aux pieds d’un tel Dieu t’avoir précipité ?
Et tu nous y poussais avec ta véhémence,
Nous défiant ailleurs de trouver la clarté.
L’absurde Foi, voilà ton unique lumière ;
Tu t’es sur ce flambeau jeté de désespoir.
Croire ! aveu d’impuissance et ressource dernière
D’un pauvre être ignorant qui renonce à savoir.
Nous n’y renonçons point. Puisqu’un doute invincible
Sape en ses fondements jusqu’au dernier autel,
Et que notre raison se heurte à l’impossible
Lorsqu’elle croit saisir le fantôme immortel ;
Puisqu’elle ne veut point, résignée à se taire,
Pour résoudre un problème acceptant un mystère,
Dans l’abêtissement lier l’essor humain ;
Surtout puisque devant l’injustice infinie
La conscience en nous, Pascal, s’indigne et nie,
Nous chercherons sans toi sur un autre chemin.

Nous voulons avant tout, pour la nacelle humaine,
Un pilote plus sûr que le mensonge saint,
Et nous repousserons toute chimère vaine
Qui, comme rive ou port, nous offrirait son sein ;
Car nous avons élu pour objet de conquête,
Non une illusion, mais la réalité.
Entre un gouffre et le ciel après avoir flotté,