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Où, livide, pendait ton Dieu même immolé.
Pour l’avoir aperçue à travers les ténèbres,
Tu te dis éclairé ; tu n’étais qu’aveuglé.
En proie aux visions d’une peur insensée,
Tu t’élances vers Elle, implorant ton salut ;
Gloire, plaisirs, travaux, ta vie et ta pensée,
Tu jettes tout au pied d’un gibet vermoulu.
Nous te surprenons là, spectacle qui nous navre,
Te consumant d’amour dans les bras d’un cadavre,
Et croyant sur son sein trouver ta guérison.
Mais tu n’étreins, hélas ! qu’une forme insensible,
Et, bien loin d’obtenir un miracle impossible,
Dans cet embrassement tu laissas ta raison.
La Croix a triomphé ; ta défaite est complète ;
Oui ! te voilà vaincu, subjugué, prosterné.
Au lieu comme autrefois d’un héroïque athlète,
Nous n’avons sous les yeux qu’un pauvre halluciné.
Comment ? tant de faiblesse après tant de vaillance !
Puisqu’entre ces trépas tu pouvais faire un choix,
N’eût-il pas mieux valu périr sans défaillance
Dévoré par le Sphinx qu’écrasé sous la Croix ?