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Ivres et haletants, portés de ciel en ciel
Par l’aveugle et fougueux torrent des Destinées,
Pourquoi jaillissez-vous du Vide originel ?
Que sont des milliards de milliards d’années,
Quand vient l’heure où tout rentre au repos éternel ?

Soleils, Mondes, Amour, illusions sublimes,
Désirs, splendeurs ! si tout est éphémère et vain
Dans nos cœurs aussi bien qu’en vos profonds abîmes,
Votre instant est sacré, votre rêve est divin,
Soleils, Mondes, Amour, illusions sublimes !

Croules donc dans la nuit du Gouffre illimité,
Mondes ! Vivants soleils, éteignez donc vos flammes !
Et toi, qui fais un Dieu de l’homme, ô volupté,
Amour ! Tu peux mourir, ô lumière des âmes,
Car ton rapide éclair contient l’éternité.