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Mais, chaque jour, pâlit leur fanatique instinct ;
Le grand buisson ardent de lui-même s’éteint.
Tu seras homme à peine, et déjà l’Armorique
Ne verra plus en toi qu’un fantôme historique.
Si tu parais alors, si quelque flot marin
Jette sur les récifs l’élève de Tharin,
Les pêcheurs, oublieux d’une époque effacée,
Demanderont d’où vient l’étrange cétacée,
Et, comme les débris d’un navire lépreux,
Comme les os d’un phoque anonyme pour eux,
Repousseront du pied, à la mer qui l’apporte,
Le cadavre flottant de la royauté morte.
Si ton clan vagabond, pour vaincre sans danger,
Se glissait dans nos ports derrière l’étranger,
La terre de l’ouest, grasse de funérailles ;
Aux Français rénégats ouvrirait ses entrailles ;

À l’appel de Sinon, les ennemis venus
Reculeraient d’effoir devant ces bords connus,
Car ils verraient encore un linceul d’algue verte
Rouler des os blanchis sur la plage déserte,
Et le flot prophétique, aux coups de l’aviron,
Répondrait en grondant  : Quiberon ! Quiberon !

Écoute, cependant : quand tu pleures la France,
Si le mal du pays est ta seule souffrance,