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Sur la prédiction d’Iphictone à Macbeth,
Berçant de rêves d’or ma jeunesse orpheline,
Il me semblait ouïr une voix sibylline
Qui murmurait aussi : « L’avenir est à toi ;
La Poésie est reine ; enfant, tu seras roi ! »
Vains présages, hélas ! ma muse voyageuse
À tenté, sur leur foi, cette mer orageuse
Où, comme Adamastor debout sur un écueil,
Le spectre de Gilbert plane sur un cercueil.
J’ai visité Paris ; Paris, sol plus aride
Au malheur suppliant que les rocs de Tauride ;
Où l’air manque aux aiglons méditant leur essor ;
Où les jeunes talents, cahotés par le sort,
Trébuchant à la fin, de secousse en secousse,
Contre la fosse ouverte où disparut Escousse,
N’ont plus, en s’abordant, qu’un salut à s’offrir,
Le salut monacal : Frères, il faut mourir !
Mon doux pays, alors, me souriait en rêves,
Comme à Jean-Jacques enfant son beau lac et ses grèves ;
Je revoyais Provins et ses coteaux aimés,
De tant de souvenirs, de tant de fleurs semés ;
Son dôme occidental, dont chaque soir le faîte
S’illumine au soleil comme pour une fête ;
Sa tour, dont le lichen crevasse le granit,
Où la guerre tonnait, où l’oiseau fait son nid :