Page:Œuvres de Hégésippe Moreau (Garnier, 1864).djvu/270

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lorsque Macaria ne l’emplirait plus. Il regardait les fleurs symboliques avec des yeux brillants de larmes, et sa figure alors exprimait une telle douleur que sa sœur, habituée pourtant depuis douze ans à le voir souffrir, en fut épouvantée.

« Oh ! pauvre enfant ! dit-elle ; pardonne-moi !

— Te pardonner, Macaria ! quoi donc ? tous les bonheurs que tu me fais ?

— Ne me remercie plus de mes soins pour toi : c’est une dette, c’est une expiation…»

Les regards ébahis de l’enfant sollicitaient le mot de cette énigme.

« Écoute, dit-elle, il y a quatre ans (tu en avais huit alors, et moi quatorze), il s’est passé dans notre famille des choses merveilleuses et fatales que mon père et mes frères ont toujours ignorées.

« Tu te souviens de cette cabane qu’ils bâtirent au bord de la mer, pour se dérober à de nombreux et puissants persécuteurs ? Un soir, mon père et mes frères étaient à la chasse : las d’avoir couru depuis le matin par les bois, tu venais de t’endormir d’un profond sommeil, bercé par le bruit monotone de la pluie sur la cabane ; la nuit était tombée depuis longtemps, et mon père et mes frères ne rentraient pas encore. Enfin j’entendis heurter à la porte, et j’ouvris, croyant leur ouvrir : c’était un voyageur qui sollicitait, pour un instant, un abri et un foyer. Il entra. Assise à ton chevet, pendant qu’il faisait sécher ses habits devant l’âtre, je vis avec surprise une douce et vague lumière courir sur ses cheveux blonds. J’attribuai cela d’abord au reflet du foyer ; mais le foyer s’éteignit, et le front du voyageur resta lumineux. Alors, je reconnus Apollon ;