Page:Œuvres de Hégésippe Moreau (Garnier, 1864).djvu/118

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De son char voyageur fatigue les essieux.
Les beaux jours sont passés ; qu’importe ! heureux du monde !
Abandonnez vos parcs au vent qui les émonde ;
Tombez de vos châteaux dans la ville, où toujours
On peut avec de l’or se créer de beaux jours.
Dans notre Babylone, hôtellerie immense,
Pour les élus du sort le grand festin commence.
Ruez-vous sur Paris comme des conquérants ;
Précipitez sans frein vos caprices errants ;
À vous tous les plaisirs et toutes les merveilles,
Le pauvre et ses sueurs, le poëte et ses veilles,
Les fruits de tous les arts et de tous les climats,
Les chants de Rossini, les drames de Dumas ;
À vous les nuits d’amour, la bacchanale immonde :
À vous pendant six mois Paris, à vous le monde !…
Ne craignez pas Thémis : devant le rameau d’or,
Cerbère à triple gueule, elle s’apaise et dort.

Mais, pour bien savourer ce bonheur solitaire
Qu’assaisonne d’avance un jeûne volontaire,
Ne regardez jamais autour de vous ; passez
De vos larges manteaux masqués et cuirassés,
Car, si vos yeux tombaient sur les douleurs sans nombre
Qui rampent à vos pieds et frissonnent dans l’ombre,
Comme un frisson de fièvre, à la porte d’un bal,