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Mais, comme désormais nous ne ferons plus rien sans le secours de l’imagination, il faut dis­tinguer avec soin sous quelle idée chaque mot doit se présenter à notre intelligence. Aussi nous proposons-nous d’examiner ces trois manières de parler : l’étendue occupe le lieu, tout corps a de l’étendue, l’étendue n’est pas le corps. La première montre comment l’étendue se prend pour ce qui est étendu ; en effet, je conçois tout-à-fait la même chose quand je dis l’étendue occupe le lieu, que si je disais l’être étendu oc­cupe le lieu. Et il n’en résulte pas cependant qu’il vaille mieux, pour éviter l’équivoque, se servir du mot l’être étendu ; il n’exprimeroit pas aussi distinctement l’idée que nous concevons, savoir, qu’un sujet occupe le lieu parcequ’il est étendu ; et peut-être pourroit-on entendre que l’être étendu est un sujet qui occupe le lieu, tout comme quand je dis qu’un être animé occupe le lieu. Cela explique pourquoi nous avons préféré dire que nous traiterions de l’étendue (extensione), plutôt que de l’être étendu (de extenso), encore bien que nous pensions que la première ne doit pas être comprise autrement que comme l’être étendu. Passons à ces mots, tout corps a de l’étendue ; où nous comprenons qu’étendue veut dire quelque autre chose que corps, sans cependant que nous formions dans notre imagination deux idées dis-