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troisième et une quatrième, enfin entre une qua­trième et une cinquième, je ne vois pas pour cela le rapport de la première à la cinquième, et je ne puis le déduire des rapports déjà connus sans me les rappeler tous. Il est donc nécessaire que ma pen­sée les parcoure de nouveau, jusqu’à ce qu’enfin je puisse passer de la première à la dernière assez vite pour paraître, presque sans le secours de la mémoire, en embrasser la totalité d’une seule et même intuition.

Cette méthode, comme tout le monde le voit, remédie à la lenteur de l’esprit, et augmente même son étendue. Mais ce qu’il faut en outre remarquer, c’est que l’utilité de cette règle consiste surtout en ce que, accoutumés à réfléchir à la dépendance mutuelle de propositions simples, nous acquérons l’habitude de distinguer d’un seul coup celles qui sont plus ou moins relatives, et par quels degrés il faut passer pour les ramener à l’absolu. Par exemple, si je parcours un certain nombre de gran­deurs en proportion continue, je remarquerai tout ceci : savoir, que c’est par une conception égale, et ni plus ni moins facile, que je reconnois le rapport de la première à la deuxième, de la deuxième à la troisième, de la troisième à la quatrième, et ainsi de suite, tandis qu’il ne m’est pas si facile de reconnoitre dans quelle dépendance est la seconde de la première et de la troisième tout à la fois,