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usage de ces deux passions. Car d’autant qu’on a l’âme plus noble et plus généreuse, d’autant a-t-on plus d’inclination à rendre à chacun ce qui lui appartient ; et ainsi on n’a pas seulement une très profonde humilité au regard de Dieu, mais aussi on rend sans répugnance (456) tout l’honneur et le respect qui est dû aux hommes, à chacun selon le rang et l’autorité qu’il a dans le monde, et on ne méprise rien que les vices. Au contraire, ceux qui ont l’esprit bas et faible sont sujets à pécher par excès, quelquefois en ce qu’ils révèrent et craignent des choses qui ne sont dignes que de mépris, et quelquefois en ce qu’ils dédaignent insolemment celles qui méritent le plus d’être révérées. Et ils passent souvent fort promptement de l’extrême impiété à la superstition, puis de la superstition à l’impiété, en sorte qu’il n’y a aucun vice ni aucun dérèglement d’esprit dont ils ne soient capables.

Art. 165. De l’espérance et de la crainte.

L’espérance est une disposition de l’âme à se persuader que ce qu’elle désire adviendra, laquelle est causée par un mouvement particulier des esprits, à savoir, par celui de la joie et du désir mêlés ensemble. Et la crainte est une autre disposition de l’âme qui lui persuade qu’il n’adviendra