Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome IV.djvu/177

Cette page n’a pas encore été corrigée

c’est-à-dire que les esprits continuent à se mouvoir d’une même teneur dans le cerveau. Desquelles propriétés la première se rencontre bien plus en l’orgueil et en la bassesse qu’en la générosité et en l’humilité vertueuse ; et au contraire, la dernière se remarque mieux en celles-ci qu’aux deux autres. Dont la raison est que le vice vient ordinairement de l’ignorance, et que ce sont ceux qui se connaissent le moins qui sont les plus sujets à s’enorgueillir et à s’humilier plus qu’ils ne doivent, à cause que tout ce qui leur arrive de nouveau les surprend et fait que, se l’attribuant à eux-mêmes, ils s’admirent, et qu’ils s’estiment ou se méprisent selon qu’ils jugent que ce qui leur arrive est à leur avantage ou n’y est pas. Mais, parce que souvent après une chose qui les a enorgueillis en survient une autre qui les humilie, le mouvement de leurs passions est variable. Au contraire, il n’y a rien en la générosité qui ne soit compatible avec l’humilité vertueuse, ni rien ailleurs qui les puisse changer, ce qui fait que leurs mouvements sont fermes, constants et toujours fort semblables à eux-mêmes. Mais ils ne viennent pas tant de surprise, parce que ceux qui s’estiment en cette façon connaissent assez quelles sont les causes qui font qu’ils s’estiment. Toutefois on peut dire que ces causes sont si merveilleuses (à savoir, la (453) puissance d’user de son libre arbitre, qui