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raison. C’est pourquoi, encore qu’il soit bon d’être né avec quelque inclination à cette passion, parce que cela nous dispose à l’acquisition des sciences, nous devons toutefois tâcher par après de nous délivrer le plus qu’il est possible. Car il est aisé de suppléer à son défaut par une réflexion et attention particulière, à laquelle notre volonté peut toujours obliger notre entendement lorsque nous jugeons que la chose qui se présente en vaut la peine ; mais il n’y a point d’autre remède pour s’empêcher d’admirer avec excès que d’acquérir la connaissance de plusieurs choses, et de s’exercer en la considération de toutes celles qui peuvent sembler les plus rares et les plus étranges.

Art. 77. Que ce ne sont ni les plus stupides ni les plus habiles qui sont le plus portés à l’admiration.

Au reste, encore qu’il n’y ait que ceux qui sont hébétés et stupides qui ne sont point portés de leur (386) naturel à l’admiration, ce n’est pas à dire que ceux qui ont le plus d’esprit y soient toujours le plus enclins ; mais ce sont principalement ceux qui, bien qu’ils aient un sens commun assez bon, n’ont pas toutefois grande opinion de leur suffisance.

Art. 78.