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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

DE LA NATURE DE L’ESPRIT HUMAIN.

La première chose que je trouve ici digne de remarque, est de voir que M. Descartes établisse pour fondement et premier principe de toute sa philosophie ce qu’avant lui saint Augustin, homme de très grand esprit et d’une singulière doctrine non seulement en matière de théologie, mais aussi en ce qui concerne l’humaine philosophie, avoit pris pour la base et le soutien de la sienne. Car dans le livre second du libre arbitre, chap. III, Alipius disputant avec Évodius, et voulant prouver qu’il y a un Dieu, « premièrement, dit-il, je vous demande, afin que nous commencions par les choses les plus manifestes, savoir si vous êtes, ou si peut-être vous ne craignez point de vous méprendre en répondant à ma demande, combien qu’à vrai dire si vous n’étiez point, vous ne pourriez jamais être trompé. » Auxquelles paroles reviennent celles-ci de notre auteur : « Mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très rusé, qui met toute son industrie à me tromper toujours. Il est donc sans doute que je suis, s’il me trompe. » Mais poursuivons, et, afin de ne nous point éloigner de notre sujet, voyons comment de ce principe on peut conclure que notre esprit est distinct et séparé du corps.