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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

ment fausses, en un autre sens que celui que j’ai déjà expliqué ; c’est à savoir, soit que le froid soit une chose positive, soit qu’il soit une privation, je n’ai pas pour cela une autre idée de lui, mais elle demeure en moi la même que j’ai toujours eue ; laquelle je dis me donner matière ou occasion d’erreur, s’il est vrai que le froid soit une privation, et qu’il n’ait pas autant de réalité que la chaleur, d’autant que venant à considérer l’une et l’autre de ces idées, selon que je les ai reçues des sens, je ne puis reconnoître qu’il y ait plus de réalité qui me soit représentée par l’une que par l’autre.

Et certes je n’ai pas confondu le jugement avec l’idée ; car j’ai dit qu’en celle-ci se rencontroit une fausseté matérielle ; mais dans le jugement il ne peut y en avoir d’autre qu’une formelle. Et quand il dit que « l’idée du froid est le froid même, en tant qu’il est objectivement dans l’entendement, » je pense qu’il faut user de distinction ; car il arrive souvent dans les idées obscures et confuses, entre lesquelles celles du froid et de la chaleur doivent être mises, qu’elles se rapportent à d’autres choses qu’à celles dont elles sont véritablement les idées. Ainsi, si le froid est seulement une privation, l’idée du froid n’est pas le froid même en tant qu’il est objectivement dans l’entendement, mais quelque autre chose qui est prise faussement pour cette