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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

être ; mais lui, prenant la chose autrement, prouve que Dieu n’est point produit par soi-même, et qu’il n’est point conservé par une action positive de la cause efficiente, de quoi je demeure aussi d’accord.

Enfin, la troisième est qu’il ne peut y avoir rien dans notre esprit dont nous n’ayons connoissance, ce que j’ai entendu des opérations, et lui le nie des puissances.

Mais je tâcherai d’expliquer tout ceci plus au long. Et premièrement où il dit que « si le froid est seulement une privation, il ne peut y avoir d’idée qui me le représente comme une chose positive[1], » il est manifeste qu’il parle de l’idée prise formellement. Car, puisque les idées mêmes ne sont rien que des formes, et qu’elles ne sont point composées de matière, toutes et quantes fois qu’elles sont considérées en tant qu’elles représentent quelque chose, elles ne sont pas prises matériellement, mais formellement ; que si on les considéroit non pas en tant qu’elles représentent une chose ou une autre, mais seulement comme étant des opérations de l’entendement, on pourroit bien à la vérité dire qu’elles seroient prises matériellement, mais alors elles ne se rapporteroient point du tout à la vérité ni à la fausseté des objets. C’est pourquoi je ne pense pas qu’elles puissent être dites matérielle-

  1. Voyez quatrièmes objections, page 18 de ce volume.