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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

pas être ainsi entendues comme des choses complètes, si outre la longueur et la largeur on ne leur attribue aussi la profondeur.

Et enfin, de ce que la faculté de penser est assoupie dans les enfants, et que dans les fous elle est non pas à la vérité éteinte, mais troublée, il ne faut pas penser qu’elle soit tellement attachée aux organes corporels qu’elle ne puisse être sans eux. Car, de ce que nous voyons souvent qu’elle est empêchée par ces organes, il ne s’ensuit aucunement qu’elle soit produite par eux ; et il n’est pas possible d’en donner aucune raison, tant légère qu’elle puisse être.

Je ne nie pas néanmoins que cette étroite liaison de l’esprit et du corps que nous expérimentons tous les jours ne soit cause que nous ne découvrons pas aisément et sans une profonde méditation la distinction réelle qui est entre l’un et l’autre. Mais, à mon jugement, ceux qui repasseront souvent dans leur esprit les choses que j’ai écrites dans ma seconde Méditation, se persuaderont aisément que l’esprit n’est pas distingué du corps par une seule fiction ou abstraction de l’entendement, mais qu’il est connu comme une chose distincte, parcequ’il est tel en effet. Je ne réponds rien à ce que M. Arnauld a ici ajouté touchant l’immortalité de l’âme, puisque cela ne m’est point contraire ; mais pour ce qui regarde les âmes des bêtes, quoique leur