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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

corps se rapporte à l’esprit, comme le genre à l’espèce : car encore que le genre puisse être conçu sans cette particulière différence spécifique, ou sans celle-là, l’espèce toutefois ne peut en aucune façon être conçue sans le genre. Ainsi, par exemple, nous concevons aisément la figure sans penser au cercle, quoique cette conception ne soit pas distincte, si elle n’est rapportée à quelque figure particulière, ni d’une chose complète, si elle ne comprend la nature du corps, mais nous ne pouvons concevoir aucune différence spécifique du cercle que nous ne pensions en même temps à la figure. Au lieu que l’esprit peut être conçu distinctement et pleinement, c’est-à-dire autant qu’il faut pour être tenu pour une chose complète, sans aucune de ces formes ou attributs au moyen desquels nous reconnoissons que le corps est une substance, comme je pense avoir suffisamment démontré dans la seconde Méditation ; et le corps est aussi conçu distinctement et comme une chose complète, sans aucune des choses qui appartiennent à l’esprit.

Ici néanmoins M. Arnauld passe plus avant, et dit, « encore que je puisse acquérir quelque notion de moi-même sans la notion du corps, il ne résulte pas néanmoins de là que cette notion soit complète et entière, en telle sorte que je sois assuré que je ne me trompe point lorsque j’exclus le corps de mon essence. » Ce qu’il explique par