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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

RÉPONSE À LA PREMIÈRE PARTIE.


DE LA NATURE DE L’ESPRIT HUMAIN.


Je ne m’arrêterai point ici à le remercier du secours qu’il m’a donné en me fortifiant de l’autorité de saint Augustin, et de ce qu’il a proposé mes raisons de telle sorte qu’il sembloit avoir peur que les autres ne les trouvassent pas assez fortes et convaincantes.

Mais je dirai d’abord en quel lieu j’ai commencé de prouver comment, de ce que je ne connois rien autre chose qui appartienne à mon essence, c’est-à-dire l’essence de mon esprit, sinon que je suis une chose qui pense, il s’ensuit qu’il n’y a aussi rien autre chose qui en effet lui appartienne. C’est au même lieu où j’ai prouvé que Dieu est ou existe, ce Dieu, dis-je, qui peut faire toutes les choses que je conçois clairement et distinctement comme possibles. Car, quoique peut-être il y ait en moi plusieurs choses que je ne connois pas encore (comme en effet je supposois en ce lieu-là que je ne savois pas encore que l’esprit eût la force de mouvoir le corps ou qu’il lui fût substantiellement uni), néanmoins, d’autant que ce que je connois être en moi me suffit pour subsister avec cela seul, je suis assuré que Dieu me pouvoit créer sans les autres choses que je ne connois pas encore, et partant que ces autres choses n’appartiennent point à l’essence de