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OBJECTIONS ET RÉPONSES.


le terme du corps ; au contraire, je crois qu’elle peut fort proprement être appelée l’extrémité tant du corps contenu que de celui qui contient, au sens que l’on dit que les corps contigus sont ceux dont les extrémités sont ensemble. Car de vrai, quand deux corps se touchent mutuellement, ils n’ont ensemble qu’une même extrémité, qui n’est point partie de l’un ni de l’autre, mais qui est le même mode de tous les deux, et qui demeurera toujours le même, quoique ces deux corps soient ôtés, pourvu seulement qu’on en substitue d’autres en leur place qui soient précisément de même grandeur et figure. Et même ce lieu, qui est appelé par les péripatéticiens la superficie du corps qui environne, ne peut être conçu être une autre superficie que celle qui n’est point une substance, mais un mode. Car on ne dit point que le lieu d’une tour soit changé, quoique l’air qui l’environne le soit, ou qu’on substitue un autre corps en la place de la tour ; et partant la superficie, qui est ici prise pour le lieu, n’est point partie de la tour, ni de l’air qui l’environne. Mais, pour réfuter entièrement l’opinion de ceux qui admettent des accidents réels, il me semble qu’il n’est pas besoin que je produise d’autres raisons que celles que j’ai déjà avancées ; car premièrement, puisque nul sentiment ne se fait sans contact, rien ne peut être senti que la superficie des corps. Or, s’il y a des ac-