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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

pas occasion de s’émouvoir beaucoup, jusqu’à ce qu’ils aient vu si, dans cette physique que vous nous promettez, vous aurez suffisamment démontré toutes ces choses ; il est vrai qu’ils ont de la peine à croire qu’elle nous les puisse si clairement proposer que nous les devions embrasser, au préjudice de ce que l’antiquité nous en a appris.

[1] La réponse que vous avez faite aux cinquièmes objections a donné lieu au huitième scrupule. Et de vrai comment se peut-il faire que les vérités géométriques où métaphysiques, telles que sont celles dont vous avez fait mention en ce lieu-là, soient immuables et éternelles, et que néanmoins elles ne soient pas indépendantes de Dieu ? Car en quel genre de cause dépendent-elles dé lui ? A-t-il donc bien pu faire que la nature du triangle ne fut point ? Et comment, je vous prie, auroit-il pu faire qu’il n’eût pas été vrai de toute éternité que deux fois quatre fussent huit, ou qu’un triangle n’eût pas trois angles ? Et partant, ou ces vérités ne dépendent que du seul entendement, lorsqu’il pense, ou elles dépendent de l’existence des choses mêmes, ou bien elles sont indépendantes : vu qu’il ne semble pas possible que Dieu ait pu faire qu’aucune de ces essences ou vérités ne fut pas de toute éternité.

  1. Voyez réponses aux cinquièmes objections, page 287 de ce volume.