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OBJECTIONS ET RÉPONSES.

demi-cercle a un angle droit, ce qui est la notion du triangle rectangle, que je suis assuré que j’existe de ce que je pense.

Tout ainsi donc que celui-là se trompe de ce qu’il pense qu’il n’est pas de l’essence de ce triangle, qu’il connoît clairement et distinctement être rectangle, que le carré de sa base soit égal aux carrés des côtés, pourquoi peut-être ne me trompé-je pas aussi en ce que je pense, que rien autre chose n’appartient à ma nature, que je sais certainement et distinctement être une chose qui pense, sinon que je suis une chose qui pense, vu que peut-être il est aussi de mon essence que je sois une chose étendue ?

Et certainement, dira quelqu’un, ce n’est pas merveille si, lorsque de ce que je pense je viens à conclure que je suis, l’idée que de là je forme de moi-même ne me représente point autrement à mon esprit que comme une chose qui pense, puisqu’elle a été tirée de ma seule pensée. De sorte que je ne vois pas que de cette idée l’on puisse tirer aucun argument pour prouver que rien autre chose n’appartient à mon essence que ce qui est contenu en elle.

On peut ajouter à cela que l’argument proposé semble prouver trop, et nous porter dans cette opinion de quelques platoniciens, laquelle néanmoins notre auteur réfute, que rien de corporel