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Et, encore qu’en cette Méditation j’aie seulement traité de l’esprit humain, elle n’est pas pour cela moins utile à faire connoître la différence qui est entre la nature divine et celle des choses matérielles. Car je veux bien ici avouer franchement que l’idée que nous avons, par exemple, de l’entendement divin ne me semble point différer de celle que nous avons de notre propre entendement, sinon seulement comme l’idée d’un nombre infini diffère de l’idée du nombre binaire ou du ternaire ; et il en est de même de tous les attributs de Dieu, dont nous reconnoissons en nous quelque vestige.

Mais, outre cela, nous concevons en Dieu une immensité, simplicité ou unité absolue, qui embrasse et contient tous ses autres attributs, et de laquelle nous ne trouvons ni en nous ni ailleurs aucun exemple ; mais elle est, ainsi que j’ai dit auparavant, comme la marque de l’ouvrier imprimée sur son ouvrage. Et, par son moyen, nous connoissons qu’aucune des choses que nous concevons être en Dieu et en nous, et que nous considérons en lui par parties, et comme si elles étoient distinctes, à cause de la foiblesse de notre entendement et que nous les expérimentons telles en nous, ne conviennent point à Dieu et à nous, en la façon qu’on nomme univoque dans les écoles ; comme aussi nous connoissons que de plusieurs choses particulières qui n’ont point de fin, dont nous avons les idées,