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soit formée en vous par un ange réellement existant, bien que l’ange soit plus parfait que vous. Mais je dis de plus que vous n’avez pas l’idée de Dieu non plus que celle d’un nombre ou d’une ligne infinie, laquelle quand vous pourriez avoir, ce nombre néanmoins est entièrement impossible : ajoutez à cela que l’idée de l’unité et simplicité d’une seule perfection, qui embrasse et contienne toutes les autres, se fait seulement par l’opération de l’entendement qui raisonne, tout ainsi que se font les unités universelles, qui ne sont point dans les choses, mais seulement dans l’entendement, comme on peut voir par l’unité générique, transcendantale, etc.

En troisième lieu, puisque vous n’êtes pas encore assuré de l’existence de Dieu, et que vous dites[1] néanmoins que vous ne sauriez être assuré d’aucune chose, ou que vous ne pouvez rien connoître clairement et distinctement si premièrement vous ne connoissez certainement et clairement que Dieu existe, il s’ensuit que vous ne savez pas encore que vous êtes une chose qui pense, puisque, selon vous, cette connoissance dépend de la connoissance claire d’un Dieu existant, laquelle vous n’avez pas encore démontrée, aux lieux où vous concluez que vous connoissez clairement ce que vous êtes. Ajoutez à cela qu’un athée connoit clairement et distinctement que les trois an-

  1. Voyez Méditation II, page 251 .