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tout l’orgueil des monarchies ; à Venise, le pouvoir des nobles, l’esclavage du peuple, une liberté tyrannique ; à Florence, les Médicis, les arts, et Galilée ; à Rome, toutes les nations rassemblées par la religion, spectacle qui vaut peut-être bien celui des statues et des tableaux ; en Angleterre, les droits des peuples luttant contre ceux des rois, Charles Ier sur le trône, et Cromwel encore dans la foule (4). L’âme de Descartes, à travers tous ces objets, s’élève et s’agrandit. La religion, la politique, la liberté, la nature, la morale, tout contribue à étendre ses idées ; car l’on se trompe si l’on croit que l’âme du philosophe doit se concentrer dans l’objet particulier qui l’occupe. Il doit tout embrasser, tout voir. Il y a des points de réunion où toutes les vérités se touchent ; et la vérité universelle n’est elle-même que la chaîne de tous les rapports. Pour voir de plus près le genre humain sous toutes les faces, Descartes se mêle dans ces jeux sanglants des rois, où le génie s’épuise à détruire, et où des milliers d’hommes, assemblés contre des milliers d’hommes, exercent le meurtre par art et par principes (5). Ainsi Socrate porta les armes dans sa jeunesse. Partout il étudie l’homme et le monde. Il analyse l’esprit humain ; il observe les opinions, suit leur progrès, examine leur influence, remonte à leur source. De ces opinions, les unes