Page:Œuvres de Chaulieu (Pissot 1777) - Tome 1.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tu penses que le Sage avec tranquillité
Laisse couler en paix cette suite d’années
Dont nous font en naissant présent les Destinées ;
Qu il ne doit, occupé de son oisiveté,
S’embarrasser des soins de la Chose publique,
Mais goûter à longs traits la molle Volupté,
        Loin du tourbillon politique.

Souffre, mon cher Damon, qu’à tes préventions
J’ose opposer ici quelques réflexions,
Et que mon amitié, contraire à ton système,
        T’impose une espèce de loi,
En te faisant sentir ce que doit à soi-même,
Ce que doit à l’État un homme tel que toi.

        Dès-lors[1] que né sous d’heureux temps
        Où le mérite et les talens
        Ont une sûre récompense,
        Sans qu’il en coûte d’innocence,
        De manege ni de détour,
Sans l’indigne métier d’aller faire sa cour ;
        Un doux regard de la Fortune,
        Après un long aveuglement,
        D’une condition commune
        Vous appelle au Gouvernement,
On ne doit plus souffrir que la Raison replique ;

  1. À moins, mon cher Damon, que né sous d’heureux temps, &c, Edit. 1733.