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cœur, d’attendre le vieillard extraordinaire, dont l’abord fut tout à fait gracieux, et qui nous parla fort civilement de cette sorte :

Messieurs, je ne suis point surpris
Que de ma rencontre imprévue
Vous ayez un peu l’âme émue ;
Mais, lorsque vous aurez appris
En quel rang les destins ont mis
Ma naissance à vous inconnue,
Et le sujet de ma venue,
Vous rassurerez vos esprits.

Je suis le Dieu de ce ruisseau,
Qui, d’une urne jamais tarie
Penchée au pied de ce coteau,
Prends le soin dans cette prairie
De verser incessamment l’eau
Qui la rend si verte et fleurie.

Depuis huit jours, matin et soir,
Vous me venez réglément voir
Sans croire me rendre visite.
Ce n’est pas que je ne mérite
Que l’on me rende ce devoir :

Car enfin j’ai cet avantage
Qu’un canal si clair et si net
Est le lieu de mon apanage.
Dans la Gascogne un tel partage
Est bien joli pour un cadet.

Aussi l’avez-vous trouvé tel,
Louant mes bords et leur verdure ;
Ce qui me plaît, je vous assure,