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Son métier veut, sans risquer davantage,
Que terre à terre et le long du rivage
Il fasse aller un bateau si chétif.
Et bien lui sied de tenir ce langage :
Car à Toulon ou sous le canon d’If,
Tous ports amis et d’un très bon ancrage,
Il fera mieux de prendre un nouveau suif,
Qu’un trop ardent et brusque itératif

En pleine mer à te suivre l’engage.

Sitôt pourtant que pour son équipage
Il aura fait quelque préparatif,
Ce lui seroit, Duc, un sensible outrage
Si tu croyois qu’en repos et qu’oisif,
Il attendît d’être mené captif
Par tes vaisseaux en superbe esclavage.
Non, non, bien loin d’être au combat rétif
Pour ta victoire, et devenu craintif
D’en avoir fait si rude apprentissage,
Las de se voir dans l’état défensif,
Par quelque exploit noble et de haut parage,
Qui te sera d’un nouveau choc le gage,
Jusque chez toi, plus vigoureux et vif,
Te veut porter un cartel offensif,
Comme autrefois fit ce grand personnage
Qui, d’Annibal voyant appréhensif
Le peuple et Rome être presque au pillage,
Porta la guerre aux portes de Carthage.
Tel donc bientôt, avec gros rhabillage
De ce qu’il croit le plus à son usage,
Le plus de mise et le plus portatif,
D’aucun bureau, d’aucun port ni péage