Page:Œuvres de Catulle, Tibulle et Properce, trad de Guerle, Valatour et Guenouille, 1860.djvu/152

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puis elle m'a purifié à la clarté des torches, et par une nuit sereine une noire victime est tombée devant l'autel des dieux qui président à la magie. Et moi, je ne demandais point que mon amour fût détruit tout entier, mais qu'il fût payé de retour ; je ne voudrais pas pouvoir me passer de toi.

Il était de fer, celui qui, pouvant te posséder, a follement préféré le butin et les armes. Qu'il chasse devant lui les escadrons des Ciliciens vaincus, qu'il aime à asseoir son camp sur un sol conquis que, tout couvert d'or et d'argent, il attire les regards, monté sur un coursier rapide ; moi, pourvu que je fusse près de toi, ma Délie, je me résignerais à atteler mes boeufs de ma propre main, à faire paître mon troupeau sur un mont solitaire ; pourvu que je pusse te serrer tendrement dans mes bras, je trouverais le sommeil plein de douceur sur une terre inculte. À quoi sert de coucher sur la pourpre de Tyr, si l'Amour ne nous favorise, si la nuit ne ramène que les pleurs et l'insomnie ? Car ni le duvet, ni les tapis brodés, ni le murmure d'une onde paisible ne sauraient appeler le sommeil. Mes paroles auraient-elles donc offensé la puissante Vénus, aurais-je à expier les impiétés de ma langue ? M'aurait-on accusé d'avoir porté un pied sacrilège dans les demeures des immortels, d'avoir dépouillé de leurs guirlandes les foyers sacrés ?