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mes péchés, j’aimerais mieux n’en jamais commettre. Le clergé sait très bien que des instituteurs laïques valent mieux pour nos enfants que ses Ignorantins, el que les prêtres ne sont bons qu’à élever des prétres ; mais voici pourquoi il établit ses boutiques de saints en face de nos écoles. Il n’a pas renoncé à ses vieilles idées de domination. C’est un propriétaire évincé qui n’a pas un écu vaillant, mais qui espère toujours rentrer dans ses domaines. L’autorité qu’il a perdue, il voudrait la rattraper par l’instruction publique ; il demande les enfants pour avoir les hommes : donnez-lui le champ à ensemencer, et il saura bien y faire croître une moisson qui lui revienne. Ses écoles chrétiennes, c’est un pied qu’il met chez nous, une prise de possession qu’il fait de la génération actuelle ; ce sont des baraques par lesquelles il prélude à ces grandes maisons religieuses dont il espère couvrir la France. Mais, quand bien même il parviendrait à s’emparer de l’instruction publique, où cela le conduirait-il ? La société n’est pas religieuse : lui-même s’en plaint tous les jours ; or, comme les masses réagissent sur les individus ; que c’est une loi du monde moral, aussi bien qu’une loi du monde physique, ces jeunes gens qui viennent incessamment, et de toutes parts, se mêler avec les hommes, au lieu de nous donner leurs idées, se laissent, malgré eux, et à leur insu, infiltrer par les nôtres ; ils ne nous donnent rien de leur dévotion, et nous leur donnons toute notre indifférence religieuse : c’est ainsi que la pluie qui est douce s’imprègne de sel en se confondant avec l’Océan.

Voici donc le dilemme que je pose à mes lecteurs : Ou vous êtes hostiles aux prêtres, ou vous leur êtes favorables. Si vous leur êtes hostiles, il ne faut point les aider ; car le but qu’ils se proposent est détestable. Si vous leur êtes favorables, il est fort inutile que vous les aidiez, puisque le résultat qu’ils veulent obtenir est impossible : on n’équipe pas un vaisseau quand on est sûr qu’il fera naufrage pendant la traversée.